La Tente



La tente Touareg est le foyer familial, le cocon où se réfugier quand le vent de sable souffle, ou lorsque le soleil brûle. Elle est le bien de la femme. La femme en est le pilier, l'homme n'en est que l'invité. Telle est la définition de la société Touareg des origines, société matriarcale, qui vit bien des tumultes en Algérie, pays où l'islam est obligatoire.
La tente est fabriquée en cuir, tendue sur des poteaux de bois.




Le bas de la tente est rendu hermétique au vent et au sable grâce àEsseba, natte de feuilles de palmiers tressée et ornée de cuir. L'intérieur de la tente est décoré de multiples parures de cuir sculpté, tressé, coloré. Ces objets de cuir sont le travail des femmes. Ils viennent également parer les selles de dromadaires, enjoliver les sacs de provisions. Ce sont des travaux minutieux, jouant de formes géométriques, de couleurs 

et de frises.


         La tente des Touaregs vivant au nord du Niger, dans la région d’Agadez, reflète leurs

        valeurs. Elle ne ressemble pas à l’habitation en peau des Touaregs plus occidentaux, mais est constituée d’un assemblage de nattes qu’on arrime à des arceaux faits de racines d’acacias. Sa base est un quadrilatère curviligne dont quatre piquets marqueraient les angles, au sud-est, au sud-ouest, au nord-ouest et au nord-est, mais les Touaregs en parlent comme d’un cercle. Elle s’ouvre toujours vers l’ouest.
       Comme les tentes d’un campement sont volontiers alignées du nord au sud, il y a
       dans un campement une aire occidentale, qui s’étend devant les seuils des tentes, et c’est là qu’on vit, qu’on mange, qu’on boit du thé, qu’on reçoit les visiteurs. Par contre, on se tient rarement à l’est, du côté aveugle des tentes, espace vide le plus souvent et réservé à la prière.

        « Les étoiles du Toit » La base de la tente est vue comme une réplique du cercle du monde, car la terre a pour les Touaregs la forme d’un disque. Quant à la tente elle-même, sa forme en dôme en fait une réplique de la voûte céleste. Et ses quatre piquets d’angle sont analogues aux quatre colonnes qui soutiennent la voûte céleste. Personne n’a jamais vu ces colonnes, mais afin que les hommes croient en leur existence, Dieu a disposé dans le ciel quatre étoiles à leur image. Ces quatre étoiles forment une constellation appelée « le Toit » – qui n’est autre que notre Carré de Pégase. Le Toit est, à ce qu’on raconte, le modèle à partir duquel les anciens Touaregs ont jadis appris à construire et orienter leurs tentes. Il y a probablement dans ces conceptions une lointaine origine coranique et, au-delà, biblique.





La tente, entre symbolisme et coutumes
Le nord de la tente est considéré comme néfaste, car des êtres maléfiques appelés kel-esuf (« ceux de la solitude ») s’y pressent en grand nombre, surtout au crépuscule. Tandis que le sud est chargé de bénédiction, de baraka, ce pourquoi une femme va s’y étendre quand arrive l’heure d’enfanter. Il en est de même pour le monde : « Au sud, disent les Touaregs, s’étendent les contrées fertiles d’où provient notre mil, alors qu’au nord ne règnent que le désert et la faim ». Dans le lit conjugal, l’homme se place au nord afin de protéger son épouse contre les kel-esuf. Il le fait aussi parce que le sud et le nord de la tente, en même temps que respectivement faste et néfaste, sont marqués l’un d’un caractère féminin et l’autre d’un caractère masculin. C’est pourquoi, le jour des noces, le marié doit entrer dans la tente nuptiale par le nord, et la mariée par le sud. Là encore, il en est de même pour le monde : « Lorsque Dieu créa le monde, il plaça Adam au nord et Eve au sud. Ils se mirent alors en marche, lui vers le sud, elle vers le nord, jusqu’à se rencontrer au centre du monde. » Ce type de conception est attesté chez beaucoup de peuples, mais il est rare que le côté faste de la maison et du monde soit, comme ici, le côté féminin
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Contact
Dominique CASAJUS

casajus@ivry.cnrs.
  


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